Charpente de la cathédrale de Nevers
Saint-Cyr et Sainte-Julitte



Chevet de la cathédrale de Nevers
Cathédrale de Nevers, le chevet.


A la jonction des deux fleuves, là où la petite Nièvre se mélange aux eaux de la Loire, se dresse un mont. Comme sur tout lieu remarquable de ce genre, les hommes y élèvent un édifice sacré. Le culte chrétien y est attesté dès l'époque mérovingienne par un baptistère découvert à quelques mètres de profondeur sous la cathédrale. Aujourd'hui, la cathédrale de Nevers resplendit au soleil par son calcaire blond. Cependant, plus nous en sommes proches, moins la toiture se laisse voir. En réalité ce morceau de bâtiment est toujours laissé-pour-compte dans les descriptions, conséquence du désintérêt des historiens de l'art pour ces parties dites seulement "techniques". Nous le comprenons car ces parties sont inaccessibles au public.
Et pourtant ....
Un art véritable, une esthétique, habite ces réalisations, prolongement de l'intelligence de l'homme et de sa main. Découvrons ici cet "art de la charpente".

Charpente de la cathédrale de Nevers, arrivée sous la toiture
Arrivée sous la charpente. Cathédrale de Nevers. En réalité le lieu est très sombre.

Après la lente ascension de l'escalier de pierre en colimaçon nous débouchons sous un jeu de poutres horizontales massives qui nous frôlent la tête. En levant les yeux un enchêtrement serré de poutres apparaît, aussi bien verticales, qu'horizontales, plusieurs mètres au dessus des premières, qu'obliques. Elles s'interpénètrent en un jeu compliqué, incompréhensible au néophyte.




Charpente de la cathédrale de Nevers
Charpente de la cathédrale de Nevers. Vue vers l'ouest au grand angle. En réalité, l'endroit est très sombre.

Les yeux s'habituent à l'obscurité. Le lieu est sombre, sans fenêtres, hormis les trois petites ouvertures du pignon ouest, le mur du fond. Nous circulons sur une passerelle suspendue au dessus des voûtes.

Essayons de comprendre cet enchevêtrement.

De cette passerelle, fixée sur les entraits des "fermes", nous comprenons plus facilement l'agencement des poutres entre elles. Les fermes sont les grands triangles formés par les poutres, donnant ainsi la pente du toit, son inclinaison. A la base de ce triangle une poutre horizontale relie entres elles les deux jambes descendantes de la ferme, nommées "arbalétriers", pour les empêcher de s'écarter du mur et de s'écrouler. Cette poutre est "l'entrait". Au deux-tiers de la hauteur un autre jeu d'entraits apparaît ; les faux-entraits. Tout en haut, près du pointu du toit, nous voyons encore un autre faux-entrait fixé à la ferme. Des poutres horizontales, les "pannes", relient entre elles les fermes, assurant une stabilité longitudinale. D'autres poutres, disposées en diagonales, permettent de renforcer cette stabilisation. Ce volume immense, sous la charpente, s'appelle le "comble", ou le "grand-comble".



Tournons les yeux vers l'escalier de bois qui, suite au colimaçon de pierre, nous a permis de s'élever au dessus de voûtes de la nef.

Charpente de la cathédrale de Nevers, escalier d'accès
Charpente de la cathédrale de Nevers. Vue du dos des voûtes de la nef.

Plusieurs choses sont à observer. Le mur sud est constitué de petits blocs de pierre à gauche et de gros blocs, mieux taillés, à droite. Sont-ce des campagnes de construction différentes ? Adossé au mur un dos de voûte, un extrados, se dévoile pour le plaisir de nos yeux. Sous cette voûte le sol est à 20 ? mètres. Deux entraits, à droite sur cette photo, constituent le niveau zéro du grand comble, sur lesquels la passerrelle de déambulation est fixée. L'entrait est serré par deux poutres verticales, les "contrefiches", qui diminuent sa portance, son porte-à-faux. Ces contrefiches sont fixées par boulonnage métallique à l'entrait comme aux arbalétriers, au deux tiers de leur hauteur, ainsi qu'à une autre contrefiche soutenant le faux-entrait.
Cette utilisation du fer, par boulonnage, est une technique utilisée au XIXe, comme par exemple dans la partie de la charpente et la flèche refaites par Viollet-le-duc à Notre-Dame de Paris, comme pour la flèche du XIXe également de la Sainte-Chapelle de Paris édifiée par Lassus, ainsi que la flèche de la cathédrale Sainte-Croix d'Orléans par l'architecte Boeswillwald...

Ensuite, au même endroit, levons la tête.


Charpente de la cathédrale de Nevers, une enrayure
Charpente de la cathédrale de Nevers, une enrayure

Un assemblage de poutres forme une croix, dans la largeur et dans la longueur du comble. Une autre croix, assemblée en diagonale, rejoint cette première croix, formant une étoile à huit branches. Ainsi aucune torsion de charpente n'est possible, même en cas de vent extrême. En effet, outre la pluie, le vent est un redoutable ennemi, sur le long terme, des charpentes. De plus, des contre-fiches obliques, boulonnées, venant de dessous rigidifient cette enrayure.