Cathédrale Notre Dame de Paris

La façade ouest et son incroyable message

 

Façade ouest cathédrale Notre dame de Paris

Cathédrale Notre-Dame de Paris, les trois tympans de la façade ouest.

 

La cathédrale Notre-Dame de Paris, outre son exceptionnelle rosace ouest, possède un autre trésor : l'incroyable message de sa façade ouest.

Gravé sur ses trois tympans ce message incroyable s'offre au regard des treize millions de visiteurs annuels. Cependant notre époque leur permet-elle de le comprendre ?

Vus de loin tous ces personnages de pierre se ressemblent et leur message se dilue. Ne sont-ils que sujet de décoration où donnent-ils un enseignement ?

 

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Rapprochons nous.

Le message commence au portail de droite, au portail de la Vierge à l'Enfant. Son tympan, réemploi de la cathédrale précédente, ne s'ajuste pas à l'espace prévu, tant par sa taille que par la courbure de son arc. La perfection de sa réalisation dut lui valoir l'honneur d'être scellé ici, semence reliant la nouvelle cathédrale, fondée en 1163, aux précédentes.

 

Cathédrale Notre Dame de Paris, façade ouest, la Vierge à l'Enfant.

Cathédrale Notre Dame de Paris, façade ouest, tympan de la Vierge à l'Enfant.

 

Que représente la Vierge à l'Enfant ?

Symbole majeur du christianisme, elle est Marie, mère de Jésus ou mère du Christ. Par elle Dieu s'incarne dans l'humanité. Il prend un habit de chair, comme nous. Il passe par une naissance, signe absolu de faiblesse et d'humanité. Dieu n'arrive pas parmi les hommes sur un char de feu, précédé d'une légion d'anges. Il endosse notre condition.

Dieu a fait l'homme à son image, est-il écrit dans la Bible. En s'incarnant Il se fait à notre image. L'Esprit s'incarne dans la matière.

Marie est appellée Vierge car elle est enceinte de Dieu sans rapport charnel. Etant fiancée à Joseph, elle accepte néanmoins la proposition de l'ange Gabriel venu la visiter. C'est l'épisode de l'Annonciation. Il lui propose de mettre au monde un enfant venu de l'Esprit Saint. Elle lui répond seulement "Qu'il soit fait selon sa Volonté". Confiante, elle se met cependant dans une situation très dangereuse. Son fiancé Joseph devrait la répudier pour adultère, crime puni de lapidation.

 

Trônant sous un dais architecturé à l'image de Sainte Sophie de Constantinople, Marie présente sur ses genoux son enfant Jésus qui regarde droit devant lui. Il tient de sa main gauche un livre ouvert, symbole de la Révélation qu'il annonce. De sa main droite il lève un sceptre de royauté. Ce signe de royauté temporelle peut nous apparaître comme décalé, mais pour l'homme médiéval il est un gage d'importance. Deux anges, de part et d'autre de la Vierge, les encensent. Leurs ailes et les nuées placées sur leur tête confirment le caractère surnaturel de l'Enfant Jésus. Quoique réellement homme, il est de condition céleste.

Cet enfantement surnaturel est à rapprocher de celui d'Isaac, né de Sara, épouse d'Abraham. L'épisode est relaté au chapitre 18 de la Genèse, dans l'Ancien testament. "L'Eternel lui apparut parmi les chênes de Mambré" : de sa tente Abraham voit trois hommes debout près de lui. Il court vers eux, se prosterne, les prie de rester et leur propose une collation. Il demande alors à Sara, sa femme, de prendre trois mesures de farine, de les pétrir et d'en faire des galettes. Il prend ensuite dans son troupeau un veau tendre. Les trois hommes mangent ces présents, Abraham reste debout à leur côté. L'un deux annonce son retour dans un an : "et, voici, ta femme aura un fils". Abraham et Sara sont très vieux. Devant leur étonnement, il reprend : "rien n'est étonnant de la part de l'Eternel".

 

Ravenne, église San Vital. Mosaique d'Abraham, Sarah et des trois personnes.

Ravenne (Italie), église San Vital (547apJC). Mosaïque de la visite de la Trinité auprès d'Abraham et Sara.

 

Ces trois hommes, jeunes et auréolés, sont assimilés à la Trinité, Dieu, Fils et Esprit. Pour eux, tout est possible, ils sont la Vie, sous toutes ses formes, visibles et invisibles. Abraham, Sara et les trois hommes construisent une relation. Abraham leur fait confiance comme Marie a fait confiance à l'ange Gabriel lors de l'Annonciation. Il les invite à s'assoir et prendre un repas. Sara pétrie de la farine et en fait trois galettes. Elle leur offre "le fruit de la terre et du travail des hommes", le sien, ici, à proprement parler. C'est la prière dite à la messe lors de l'offrande eucharistique. Alors les trois hommes, la Vie, rendent fertile son travail, ses offrandes. Sara devient mère à 90 ans. La Vie, "force forte de toute force" (1), triomphe. L'Esprit est descendu en terre. La terre prend Vie.

 

La représentation de la Vierge à l'Enfant est si fondamentale qu'elle figure sur presque toutes les cathédrales. La façade ouest de la cathédrale de Chartres, datée de 1145, présente une Vierge à l'Enfant quasiment identique. Elle nous permet de dater celle de Paris.

 

Cathédrale de Paris et de Chartres, la Vierge en majesté.

Cathédrale de Paris et de Chartres, Vierge en majesté.

 

La Vierge en majesté de la cathédrale Notre Dame de Paris a beaucoup moins souffert du temps et de la dégradation de la pierre. Ses traits ont été préservé de l'érosion dûe aux intempéries. Cependant la main droite de l'enfant Jésus et le sceptre de la main gauche de la Vierge sont du XIXe, comme la frise végétale couronnant son diadème.

Regardez attentivement les plis de chaque habit, de la tête jusqu'aux pieds de la Vierge et de Jésus. Tout est identique, jusqu'au majeur de la main gauche de la Vierge, sculpté avec une bague. Est-ce l'oeuvre d'un même atelier de sculpteur ? Pour le curieux souhaitant s'arrêter sur la sculpture de Chartres, voyez ici en haute résolution, un assemblage de trois photos de la Vierge à l'Enfant de la cathédrale de Chartres (2200*3800px).

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Cependant seule la cathédrale Notre Dame de Paris développe sur ses trois tympans un enseignement homogène, centré sur la Trinité incarnée et la Rédemption qui en découle pour notre monde, ou, autrement dit, à l'Esprit qui s'incarne dans la matière, nous, le vase, et le retour à l'Esprit de cette matière illuminée, nous encore.

C'est notre Vade mecum pour l'au-delà.

 

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Pour lire la suite du message, déplaçons-nous au portail royal, au milieu de la façade ouest de la cathédrale Notre-Dame de Paris.

L'Enfant Jésus grandit et, à trente trois ans, il délivre son enseignement, déja annoncé par quelques épisodes de son enfance. Sa trente troisième année est la dernière année de sa vie terrestre.

 

Cathédrale Notre Dame de Paris, façade ouest, le Christ réssuscité.

Cathédrale Notre Dame de Paris, façade ouest, le Christ ressuscité. Cliquez pour voir en gros plan les anges des voussures

 

Durant sa dernière année de vie Jésus, Esprit-Saint mis en chair par sa mère Marie, enseigne aux personnes qui le suivent le chemin caché du ciel. Il choisit ses futurs disciples. Pourquoi le "chemin caché" du ciel ? Nous le verrons plus loin.

Son enseignement est d'une simplicité extrême et d'une dureté tout aussi extrême. Heureusement ses dons de guérisseur lui rallient des foules innombrables, toujours en attente de miracles.

Il est un faiseur de miracles, étymologiquement un thaumaturge. Il nourrit des foules avec quelques pains : épisode de la multiplication des pains au bord du lac (Matthieu 14, 14-21), il transforme en vin plus de trois cent litres d'eau : épisode des noces de Cana (Jean, 1-11), il guérit des paralysés : épisode de Capharnaüm (Marc 2, 1-12), rend la vue à des aveugles (Marc 8, 22-26, Jean 9, 1-41), ressuscite des morts : résurrection de Lazarre (Jean 11, 1-57) et de la fille de Jaïre, chef de la synagogue (Mc 5, 21-43). Plus pertinent encore, au delà d'une action matérielle, il transforme les matières intangibles : il transmute les coeurs : épisode de la femme adultère (Jean 8, 1-11), de Madeleine au puit (Jean 4, 5-42), les ouvrant à la vie vers Dieu.


cathedral Notre-Dame de Paris


Jésus prêche souvent dans le Temple de Salomon au milieu des juifs. Fort de ses gestes et de ses prédications il s'attire la haine des intransigeants : n'a-t-il pas "travaillé" le jour du sabbat pour guérir un aveugle ? Déja sa naissance avait provoqué la peur du roi Hérode et l'extermination de milliers d'enfants mâles premier né. Maintenant il dérange le clergé en place. Le peuple attend un messie, un "envoyé" du ciel, qui les libérera de l'occupant romain.

Ce n'est pas la mission de Jésus. Il mène un combat plus dur, il veut que chacun se libère de son propre occupant romain, la force étrangère négative en nous, nommée égoïsme, avarice, cupidité, mensonge.. Suprême camouflet : son appel à la conversion intérieure n'est pas destiné exclusivement au peuple élu par l'ancienne alliance de Moïse, le peuple juif. Tous les hommes sont appellés à faire cette conversion, païens, grecs, juifs, orientaux...

C'en est trop. Son destin est scellé. Jésus est arrêté, jugé, mais finalement relaxé par l'occupant romain. Le peuple de Jérusalem exige alors de Ponce-Pilate, le gouverneur romain, de lui livrer Jésus. La semaine précédente le peuple fêtait le retour de Jésus à Jérusalem, monté sur un âne. Aujourd'hui, la mise à mort est déclarée... Peuple versatile à la mémoire courte.... A l'issue de tortures Jésus monte sur la colline du Golgotha, portant la traverse de sa croix sur les épaules. Il est crucifié vivant à l'aide de clous enfoncés dans ses poignets et ses pieds afin de le fixer au bois de la croix. Il rend l'âme un vendredi, nommé Vendredi Saint.

L'extraordinaire arrive après, même si ses faits et paroles sont déja suffisamment incroyables pour nous interroger sur cet homme. Ne contredit-il pas toujours le politiquement ou religieusement correct en rendant toujours sa dignité à l'homme ou à la femme blessés par la vie ?

 

cathedral Notre-Dame de Paris


Voici l'extraordinaire.

 

Trois  jours après sa crucifixion, des femmes découvrent son tombeau vide, le linceul roulé à l'emplacement de sa tête, alors que des gardes armés veillaient à ce que  personne ne vienne voler la dépouille. Marie Madeleine le croise dehors, non loin, au troisième jour de sa mort. Il est vivant. Il est donc ressuscité. Le tombeau, vide, ne contient plus son corps mais seulement le linceul qui l'enveloppait. Le linceul est un grand linge de quatre mètres de long et un mètre de large environ, qui recouvrait le corps par dessus et dessous.

 

Le vitrail gothique de la cathédrale de Lyon montre cette scène.

Cathédrale de Lyon, vitrail d'axe, le linceul du Christ enroulé

Cathédrale de Lyon, vitrail gothique de la chapelle d'axe. Seul le linceul vide du Christ se trouve dans le tombeau.

 

Les quatre évangélistes, Mathieu, Jean, Luc et Marc, racontent cet événement. Jésus a ressuscité de son vivant deux morts. Maintenant il se ressuscite lui-même. Inconcevable ! Jésus devient alors Jésus-Christ. Les textes des évangélistes citent le linge qui entoure le corps du Christ lors de sa mise au tombeau, formant son linceul. Lorsque au troisième jour après sa mort les femmes rentrent dans le tombeau ouvert, elles ne voient qu'un ange assis auprès du linceul vide et enroulé.

 

Un objet étrange, un tissu sur lequel de nombreuses études scientifiques sont menées, semble retracer cet épisode biblique. Ce tissu de 4,40 mètres de long et de 1,10m de large a recouvert un supplicié, de face et de dos. Le tissu conserve en négatif l'empreinte de cet homme. Ce tissu est ramené par le chevalier de Charny en 1353 en France. Il est actuellement conservé à  la cathédrale de Turin, et porte le nom de "Linceul" ou "Saint Suaire" de Turin, ou "Sindone", en anglais. Cliquer sur la photo pour accéder au site officiel du Saint Suaire de Turin.

 

Saint Suaire de Turin, ou Sindone

Le Saint Suaire de Turin ou le linge que la tradition dit avoir entouré le corps du Christ dans son tombeau (détail).

 

Jésus ressuscite. De mort, le voici vivant. Le tympan central de la façade ouest montre Jésus, devenu Christ car ressuscité. Il est assis sur un trône de gloire.

Incroyable ...

Mais l'Extraordinaire ne s'arrête pas là.

L'humanité elle-même est vue comme le corps du Christ. Nous sommes alors amenés à vivre après la mort physique, à notre résurrection, dans un autre corps, un corps "tout autre".

Mais il y a une condition...

Il faut avoir quitter l'emprise de ce monde et s'être mis sous l'emprise de l'Esprit, comme le demande Jésus.

Dans un incroyable raccourci Jésus énonce cette condition lors de sa crucifixion. Il est crucifié en même temps que deux autres hommes. L'un des deux se moque de Jésus mais son compagnon le reprend : "Pour nous c'est justice car nous recevons ce qu'ont mérité nos crimes ; mais celui-ci n'a rien fait de mal." Puis, il apostrophe Jésus : "Souviens toi de moi quand tu viendras dans ton règne." Jésus lui répond : " Je te le dis en vérité, aujourd'hui tu seras avec moi dans le paradis" (Evangile selon St Luc, chapitre 23, verset 41 à 43, Bible Louis Segond, 1910).


Rédemption fulgurante, où seuls quelques mots suffisent, exprimés par une soudaine, véritable et décisive conversion du coeur du bon larron. Il n'est  plus question de la pesée de l'âme au décès, ni d'attendre la Fin des Temps et encore moins de devoir vivre des milliers de réincarnation, selon les croyances ou non croyances de chacun.

Ce chemin incroyable et fulgurant est possible pour tous. Nul besoin d'avoir eu dans sa vie un statut social envié, nul besoin d'avoir été reconnu, nul besoin d'avoir été érudit .....

C'est la voie du pauvre, du pauvre de coeur, la seule voie brève et l'incroyable message de la façade ouest de la cathédrale Notre-Dame de Paris, message totalement inacceptable à l'époque de Jésus.

Et aujourd'hui ? .... Ce messsage est-il mieux accepté ?

 

 

Cathédrale Notre-Dame de Paris, le réveil des morts

 

 

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